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Film : sortie en France de "Tout va bien", une histoire chilienne

vendredi 16 septembre 2016, écrit par Eduardo Olivares Palma

Inspiré d’un fait divers qui a choqué l’opinion publique chilienne, "Tout va bien" (Aquí no ha pasado nada), montre les rouages insidieux mais implacables des inégalités sociales et du fonctionnement des élites au Chili. Le film est dans les salles à partir de ce mercredi 21 septembre. Voir ci-dessous la liste des salles.

Trois ans presque jour par jour après les faits qui l’inspirèrent et vingt jours après sa sortie dans les salles chilienne, arrive dans les salles françaises le dernier film du réalisateur chilien Alejandro Fernandez Almendras (Huacho, Tuer un homme).

Le 17 septembre 2013, Martín Larrain, fils d’un riche avocat, ancien sénateur et, à l’époque, président du parti Rénovation Nationale (centre droite) conduisait en état d’ébriété lorsqu’il faucha mortellement un piéton et prit la fuite sans porter secours à la victime Deux de ses amis fournirent un faux témoignage. Un premier rapport d’autopsie a été falsifié, celle-ci ayant confirma que le piéton aurait pu être sauvé si les accusés ne s’étaient pas enfuis. Cerise sur la gâteau, Carlos Larrain proposa d’acheter le silence de la famille de la victime pour 20 000 $.

Après plus d’un an d’enquête et de procédures pour le moins douteuses, Martin Larrain fut acquitté des charges pesant sur lui et ses amis furent déclarés coupables d’obstruction à la justice.

Alejandro Goic (l’oncle Julio), Agustín Silva (Vicente) et Paulina García (la mère de Vicente)

À écouter : une interview exclusive d’Alejandro Fernández ( en espagnol)


Tout va mal

C’est alors que, touché comme une bonne partie de la société chilienne, Alejandro Fernández Almendras décide qu’il fallait absolument réaliser Tout va bien , un film dont le propos a suscité le soutien des nombreux contributeurs de la campagne de financement participatif ainsi que l’engagement d’acteurs de renom, dont Paulina García (Gloria), Luis Gnecco (Neruda) et Alejandro Goic (El Club), et d’une bonne partie de l’équipe du film.

Presenté à la Berlinale et au Cine Latino de Toulouse ainsi qu’à San Sebastian, Sundance, Beaune et La Rochelle, le film vient d’être désigné pour être le représentant chilien pour les prestigieux prix Goya au meilleur long-métrage ibero-américain.

« J’ai toujours été intéressé par la justice ; dans le film, cette idée de justice est liée à beaucoup d’autres sujets. Je suis retourné au Chili en 2007 et les profondes inégalités que j’ai y trouvées m’ont beaucoup heurté », commente Fernández [1] à propos de son film qui, contrairement à ce que l’on pourrait penser n’est pas un pamphlet contre les "méchants" mais une manière de montrer autrement, d’une manière presque "objective", le mode de fonctionnement des puissants.

« Les gens qui évoluent dans ce milieu considèrent qu’y vivre est ce qu’il y a de plus normal. Aucun d’entre eux n’est conscient ni de l’autre, ni de la place dont il bénéficie dans la société », explique encore le réalisateur. « Ils agissent selon ses convenances, mais ignorent peut-être qui contrôle le monde. Je crois qu’ils ne le font pas par malveillance ou en jouissant de leurs avantages, comme nous aimerions le penser. C’est une idée très réconfortante de penser que la malveillance est visible, évidente et monstrueuse, car cela nous permet de croire qu’il est possible de s’immuniser contre elle ».

Avec Tout va bien et l’histoire du jeune Vicente, bouc émissaire prêt à se laisse happer par l’implacable et imparable logique du pouvoir, le cinéma chilien apporte une nouvelle pierre au regard lucide, parfois désabusé et pas souvent optimiste que les jeunes cinéastes chiliens jettent sur la société chilienne d’aujourd’hui.


[1Extraits d’un Entretien réalisé par Paula Orostica